Habituellement, je ne parle pas de politique.
Je suis de ce genre de personne qui évite les conflits à tout prix (depuis un célèbre lancé de pommes dauphines suivie de la non moins célèbre requête "ptit mille bornes ?" Ceux qui y étaient comprendront.)
La politique étant fréquemment un sujet qui génère des conflits, j’évite en général très soigneusement d’aborder ce sujet.
Je me souviendrais néanmoins toujours de la tête de ma mère ce 21 avril 2002, lorsqu’elle a vu Monsieur Jean-Marie LE PEN présent au second tour.
C’était pas le "on va tous mourir !" de la mère de Jamel ("c’est dommage mardi y’a le marché"), mais pas loin. Une sensation d’écœurement, de "pourquoi je me suis battue toutes ces années ?", de dégoût, de ne plus vouloir être français dans ces conditions…
Aujourd’hui, cette sensation d’écœurement je l’ai ressenti en voyant l’affiche ‘Les jeunes avec Marine’.
Coupin et moi avons eu la même phrase en la voyant "Ah ouais carrément !" Je constate qu’on n’a plus peur de rien en matière de propagande !
Essayons d’analyser tout ça.
Tout d’abord, le prénom : Marine.
Personnellement, il me renvoie à quelqu’un de très cher qui laisse de temps en temps des commentaires sur ce blog, pas à une personne du FN. Mais passons.
Je n’aime pas le fait de mettre les prénoms des politiques. J’essaye de m’expliquer.
Lorsque Monsieur Jacques CHIRAC était Président de la République Française, j’entendais toujours parler de lui comme ‘Monsieur CHIRAC’ ou ‘le Président CHIRAC’. Depuis que Monsieur Nicolas SARKOZY est Président de la même République Française, j’entends des ‘Nicolas SARKOZY’ à tout va. Le "Monsieur" a disparu et on oublie fréquemment de lui accoler son titre qui, qu’on soit d’accord ou pas avec sa politique, lui a été donné par les électeurs, tout comme à Monsieur Jacques CHIRAC.
Alors pourquoi accole-t-on presque systématiquement son prénom à notre nouveau Président alors qu’on ne le faisait pas avec l’ancien ?
Je trouve que ça a ce quelque chose d’infantilisant, de décrédibilisant qui m’énerve.
Dans le cas de notre affiche, c’est pire parce que le nom de famille de ‘Marine’ n’est même pas cité !
Il n’est pas nécessaire me direz-vous parce que tout le monde sait de qui on parle. Justement, c’est là le problème, pourquoi quand vous voyez une affiche comme celle là avec le prénom ‘Marine’ vous pensez tout de suite à LE PEN ?
Le nom LE PEN me renvoie plutôt à son père et à sa figure patibulaire et me fait plutôt peur. (Suffit de voir les synonymes que propose Word pour patibulaire : sinistre, inquiétant, funeste, alarmant, menaçant, angoissant)
Franchement, ça fait flipper non ?
Je pense que c’est justement pour ne pas faire peur que le nom a été ‘omis’. Astucieuse manière d’appâter l’électorat ? Je suis désolée mais, quand on veut se faire porte parole de valeurs, quelles qu’elles soient, il faut assumer. Et je passe sur le fait que la dite ‘Marine’ n’apparaisse même pas sur l’affiche.
Ensuite, l’emploi de l’impératif ‘choisis’ et le tutoiement.
L’impératif, par définition, c’est le temps de l’ordre, du conseil, de la suggestion. Personnellement, je n’ai envie d’aucun des trois de la part d’un membre de l’extrême droite. Je trouve l’emploi de l’impératif délicat en matière de publicité…ça a une connotation toujours agressive je trouve. (CHOISIS TA FRANCE ! RANGE TA CHAMBRE !) Et ça laisse tout sauf le choix.
Quant au tutoiement, on peut penser qu’il est justifié car l’affiche s’adresse aux jeunes. Alors déjà le terme ‘jeunes’ s’adresse à qui exactement ? Le jeune électorat ? Les 18-25 ? Dans ces cas là, il ne fallait pas prendre en photo un couple qui pose devant un papi en canne. J’ai moins même presque 25 ans, donc je suis considérée comme jeune. Pourtant, aucun commerçant que je peux côtoyer, ni aucun artisan venu chez moi pour les travaux ne s’adresse à moi en employant le tutoiement (ni l’impératif d’ailleurs !)
Après, le logo ‘LES JEUNES AVEC Marine’.
Pourquoi les minuscules pour le prénom et les majuscules pour le reste ? On ne saura jamais…
Le fait de l’avoir mis pile au milieu des deux images ne me semble très judicieux. D’un côté c’est avec, de l’autre c’est sans ? D’un côté c’est si on vote, de l’autre si on s’abstient ? D’un côté c’est l’été, l’autre l’hiver ? (Ben ouais, d’un côté le personnage a un manteau, de l’autre elle est en débardeur.) D’un côté c’est une pub pour un lance-flamme et de l’autre pour la foire du coin ? D’un côté on attend le bus pour partir en vacances (le sac à dos), de l’autre on fait une pause parce qu’on est fatigué ? Pas clair tout ça vous dis-je.
On passe sur le terme ‘jeunes’ qui, encore une fois, englobe tout, tout le monde (ou pas) et surtout n’importe quoi à mon avis.
Pour finir, les deux images. Où on essaye de nous faire croire qu’un monsieur qui lit un journal est moins français que deux personnes habillées en jeans, lui bien américain.
Bon alors, puisqu’il faut apparemment choisir entre les deux situations, essayons de les analyser.
- D’un côté il fait nuit, de l’autre il fait jour.
- D’un côté on habite en ville, de l’autre à la campagne.
- D’un côté on se déplace en voiture, de l’autre à pieds.
- D’un côté on se tient au courant des actualités, de l’autre on est surtout au courant de la mode.
- D’un côté, on vit dans une cité pleine de vie, de l’autre dans des maisons individuelles qui portent bien leur nom.
- D’un côté on se prépare pour un long voyage, de l’autre on a oublié ses clés.
- D’un côté des gens font un barbecue géant, de l’autre deux personnes se font chier.
- D’un côté, des gens heureux (ils lèvent les bras), de l’autre la corvée de sortir le quatrième âge le dimanche matin alors qu’on pourrait être sous la couette.
J’sais pas vous, mais moi c’est tout choisi !